Cela faisait longtemps que le pays échouait là où d’autres réussissaient. Car la part de Français adeptes du tabac stagnait depuis 2010, après avoir augmenté de 2005 à 2010.
En 2017, une nette tendance à la baisse s’est enfin amorcée. Selon des chiffres de Santé publique France, qui a salué une « baisse historique », 26,9% des 18-75 ans fumaient chaque jour, contre 29,4% un an auparavant.
« Ces résultats sont encourageants, ils marquent une rupture », a déclaré la ministre de la Santé Agnès Buzyn.
« Avec la hausse de la fiscalité nous pouvons espérer que ces résultats soient pérennes », a-t-elle ajouté, lors d’une conférence de presse à son ministère.
L’une des tendances marquantes est la baisse parmi les fumeurs les plus défavorisés pour « la première fois depuis 2000 », selon le ministère. Un signe, semble-t-il, que pour certains le paquet est devenu trop cher.
Parmi « les plus défavorisés » des Français, 34,0% fumaient chaque jour en 2017, contre 38,8% en 2016. Parmi les chômeurs, ils étaient 43,5% en 2017 contre 49,7% en 2016.
200 morts par jour
Mme Buzyn a appelé à « continuer cette lutte majeure contre l’un des plus grands fléaux de santé publique ».
En France, « le tabac tue chaque jour 200 personnes (…) On sait qu’un fumeur sur deux mourra des suites du tabac », a-t-elle déploré.
Moins de fumeurs, c’est à la fois des personnes qui ont arrêté, et d’autres qui n’ont pas commencé, notamment dans les plus jeunes générations.
« Ceux qui fument le moins, ce sont les étudiants, et c’est encourageant », a relevé le directeur général de l’agence nationale Santé publique France, François Bourdillon.
La réussite de la France est liée à un ensemble de mesures: outre la hausse de la taxation, le paquet de cigarettes neutre imposé depuis janvier 2017, et le remboursement des traitements antitabac comme n’importe quel médicament, progressivement mis en place avec la stratégie santé du gouvernement annoncée fin mars.
« Les bons résultats sont liés à l’ensemble du plan. C’est très difficile de dire quelle est la part du paquet neutre, quelle est la part du mois sans tabac, du remboursement des substituts nicotiniques », a expliqué M. Bourdillon.
27 euros en Australie
Mais il y a une autre tendance, qui ne fait pas partie de la politique gouvernementale: la cigarette électronique. « Ce que nous constatons très clairement (…) c’est que la première méthode [de sevrage] utilisée est clairement la cigarette électronique », a souligné le haut fonctionnaire.
D’après Santé publique France, le vapotage est stable. Chez les 18-75 ans, 2,7% fumaient une cigarette électronique tous les jours en 2017, autant qu’en 2016.
Mais si l’industrie des cigarettes électroniques souhaiterait voir reconnue sa contribution au recul du tabac, ce n’est pas du tout la priorité de l’exécutif. « Un dispositif comme la cigarette électronique, qui n’induit pas forcément un arrêt complet du tabac, ne joue pas le rôle que l’on souhaite. Parce que nous souhaitons (…) faire en sorte que les gens ne fument plus du tout », a estimé Mme Buzyn.
La ministre voit encore une marge de progression pour la France, par rapport à des pays où la cigarette est beaucoup plus chère.
« J’étais en Australie il y a un mois: là-bas le paquet de tabac est à 27 euros, donc c’est vraiment un produit de luxe. Et ils sont à 13% de fumeurs », a raconté la ministre.
Le 31 mai est la Journée mondiale sans tabac. D’après l’Organisation mondiale de la santé, le tabac tue plus de 7 millions de personnes par an, dont près de 900.000 qui ne fument même pas.