A deux semaines de la rentrée scolaire, la forte contagiosité du variant Delta a poussé des scientifiques à réclamer jeudi des actions plus efficaces pour éviter une flambée du virus dans les écoles, même si une vaccination des moins de 12 ans est pour le moment exclue.
Dans une tribune au Monde, une trentaine de médecins, chercheurs et enseignants plaident pour « une action ferme » et « des mesures efficaces dès la rentrée » du 2 septembre, sans aborder le sujet de la vaccination.
« Aux Etats-Unis, au Canada, en Inde, au Royaume-Uni, en Italie, en Espagne…, les pédiatres et les sociétés savantes appellent à protéger davantage les moins de 12 ans. A notre tour, aujourd’hui, de tirer la sonnette d’alarme », écrit ce collectif rassemblant notamment les épidémiologistes Dominique Costagliola et William Dab, l’infectiologue Gilles Pialoux et le Dr Jérôme Marty, président du syndicat de médecins libéraux UFML.
Ils soulignent que « le taux d’hospitalisation des 0-19 ans augmente dans les pays où le variant Delta est majoritaire ». En France où ce variant est prédominant à plus de 98 %, le nombre d’hospitalisations des 0-9 ans est « le double de celui de l’année dernière » à la même date, et « le quadruple » de celui des 10-19 ans.
Le variant Delta « a complètement changé la donne », a souligné à l’AFP Robert Cohen, président du Conseil national professionnel de pédiatrie (CNP), en notant que « mathématiquement, comme il est deux à trois fois plus contagieux, il y aura plus de formes graves et d’hospitalisations » y compris chez les plus petits, même si cela reste rare.
Mais surtout, « les enfants vont être contagieux, pratiquement autant que les adultes avec les premières souches du virus », un scénario totalement différent de la rentrée 2020, où le virus circulait très peu chez les petits, et des petits vers les adultes.
« renforcer » la prévention
C’est pourquoi le pédiatre et infectiologue hospitalier recommande de continuer de vacciner intensément les adolescents, d’augmenter la protection des enseignants, du personnel scolaire et des parents, et de « renforcer les mesures de prévention dans les écoles », avec une politique de tests « plus fréquents, plus effectifs pour dépister très tôt les cas ».
Quatre niveaux de mesures sanitaires (vert, jaune, orange et rouge) ont été définis dans un protocole publié le 28 juillet.
Le ministère de l’Education nationale doit annoncer dans les prochains jours le niveau retenu pour les écoles, collèges et lycées, en fonction du degré de circulation du virus.
Pour les auteurs de la tribune, il serait « impensable d’envisager une reprise au niveau 2 du protocole (NDLR: jaune, qui prévoit notamment l’accueil en présentiel de tous les élèves), alors que le taux d’incidence chez les 0-19 ans est cinq fois supérieur à celui de la rentrée 2020 ».
Les niveaux d’alerte plus élevés prévoient des cours hybrides (en présence et à distance), qui démarrent au lycée pour le niveau orange et dès le collège pour le niveau rouge.
Dans leur tribune, les scientifiques et enseignants préconisent le maintien du masque dès l’école élémentaire et la fermeture de toute classe quel que soit le niveau scolaire dès le premier cas de Covid-19.
« une année la plus normale possible »
Ils pointent en outre une « défaillance » des protocoles pour l’assainissement de l’air, appelant à ouvrir « bien plus fréquemment les fenêtres », à se doter systématiquement de détecteurs de CO2 et de purificateurs, déplorant aussi qu' »aucune mesure ne vise les cantines ».
Pour le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer, « l’école doit être la plus ouverte possible pour tous les enfants de France ».
Souhaitant une « année (scolaire) la plus normale possible », le ministre a souligné, lors d’un déplacement en région parisienne, l’importance de la campagne qui sera menée dès septembre « pour les élèves qui ne seraient pas vaccinés, sur le mode de l’incitation ». Il s’est félicité que plus de 52 % des adolescents (entre 12 ans et 17 ans) soient déjà vaccinés avec au moins une dose.
En revanche, le ministre a exclu une vaccination des moins de 12 ans. « C’est un sujet qui est regardé à l’échelle mondiale » mais « au moment où je parle, ce n’est pas d’actualité », a déclaré M. Blanquer.
Les laboratoires américains Pfizer et Moderna ont déjà lancé des études cliniques aux Etats-Unis sur plus de 12.000 enfants, dont les premiers résultats seront connus fin septembre, avec des autorisations attendues au plus tôt en fin d’année